COURANT ALTERNATIF --- chroniques du Calavon

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Le monde du silence



Le monde du silence



A côté du monde de la gaieté, de la joie de vivre et des rires, il y a un monde du silence. C’est celui de la tristesse infinie, de la nostalgie et de la solitude. Ce monde là grandit inexorablement et pourtant il est presque invisible. On y retrouve la cohorte lente, sombre et éplorée, des veuves et des veufs, des orphelins qui le sont trop tôt, des parents qui ont perdu un enfant, de ceux que le bonheur a quitté ou qui ne l’ont jamais connu, des êtres qui vivent sans vivre car ils sont dévorés, lentement, par une profonde et douloureuse mélancolie.

Mais quel est le vrai monde ? Celui de la joie ou celui de l’affliction ! Est-ce donc le destin de chacun de passer subitement d’un monde à l’autre ? Quel est le mérite des uns, y a-t-il une punition pour les autres ? Est-ce le fruit du hasard ou la sanction d’un jugement ?

Chaque souvenir est une épreuve. Chaque pas dans les pas de celui ou celle qui nous manque, un vrai calvaire. Chaque objet rangé, chaque souvenir à la vue d’une photo, d’un écrit, chaque vêtement dans une armoire, tout est là pour nous condamner à ne rien oublier.

Est-ce cela le purgatoire des chrétiens ? Mais alors, l’être qui nous a quitté doit lui aussi partager notre malheur, lui qui voit tout et qui peut-être pleure devant les larmes de celles et ceux qu’il a laissé...

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Une vieille dame aux cheveux blancs marche lentement dans la rue au milieu d’une foule qui ne la voit pas, qui ne sait pas et qui d’ailleurs ne veut pas savoir. La tête penchée, les yeux secs d’avoir trop pleuré, elle ressasse son malheur, pense à ses soixante ans de mariage, à son bonheur brisé. Elle oublie tous les mauvais moments pour sourire furtivement à la pensée de quelques heureux souvenirs. Elle parle dans sa tête avec son mari, lui raconte sa journée ; elle lui demande de ne pas l’oublier et d’essayer d’atténuer sa tristesse. Et dans les moments les plus intenses de son désespoir, elle le supplie de ne plus la laisser seule sur terre et de l’accueillir à ses côtés.

Cette vieille dame découvre subitement qu’elle n’est plus rien aux yeux du monde, qu’une vieille veuve, toute seule, dont le couple s’est dissocié et dont la raison de vivre n’existe presque plus.

Mais alors, ce monde du silence, que représente-t-il, quel est son exacte signification, à quoi sert-il ? Est-il le négatif de l’autre monde, celui qui vit, et auquel il faut rappeler chaque jour que son bonheur est éphémère.

Et ce silence, est-ce vraiment du silence, doit-il être opposé au bruit ? Car toutes celles et tous ceux qui paraissent muets dialoguent en permanence avec ces êtres invisibles qui les ont quitté et qui maintenant les entourent dans le mystère du Cosmos.

Car elles sont là les âmes, ils sont là les esprits, ils ne nous quittent pas, ils sont nous, complètement mélangés à notre être le plus profond, à l’écoute de notre complainte et au service de nos prières.

Ceux qui demandent, auront ; ceux qui pleurent, seront consolés ; ceux qui croient que le monde du silence est en vérité le monde de l’espérance ; alors tous, trouveront un jour un bonheur dont ils ont été privés mais qu’ils n’ont en fait jamais perdu.

JLdL





06/08/2011
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